C'est sur qu'il y a une différence entre la grenadine et le vin rouge. Ça doit surprendre
Je n'étais pas forcément pour, de partager ce texte, mais vu que le sujet remonte et qu'il m'arrive d'échanger avec des personnes de votre âge (jeunes en difficultés), pourquoi pas partager un petit extrait.
"Je suis sujet à une forte dépendance. Ce n'est pas le nombre d'années qui compte : que cela fasse dix, vingt ou trente ans qu'une personne consomme, la dépendance est la même et elle peut prendre une ampleur dramatique.
A présent, cela fait quatre mois que je suis abstinente : j'étais à la limite des dix ans de consommation, soit en tout six ans que celle-ci était journalière ; après sevrage, j'ai droit à zéro alcool, sans exceptions et ce ... à vie."C'est bête dit comme ça, nous pourrions penser que d'ici un ou deux ans, le fait de boire un verre ne sera absolument pas problématique, mais cela fait parti d'une fragilité sur laquelle, il faut rester attentif en permanence.
Il n'y a pas de guérisons garanties et il est impossible de crier victoire. C'est un combat continu, les flashs peuvent survenir à tout moment et l'envie obsessionnelle de boire peut durer des heures et des heures; le plus dur, c'est de faire ce chemin, (notamment le sevrage) particulièrement traumatisant seul ;
Le problème est, qu'il est très délicat d'en parler à des personne qui ne consomment pas :
En plus de l'étape épuisante d'un sevrage, il y a une torture mentale extrêmement douloureuse, une vie à reconstruire, l'acceptation de soi, des confrontations, un sentiment de honte particulièrement dur à vivre et le retour des souffrances qu'il faut savoir gérer et accepter.
Disons que l'
alcool permet d'esquiver et mettre de côté énormément de choses et lors d'un arrêt, il faut y faire face, parce que la différence est, qu'il n'y a aucun moyen d'y échapper, d'oublier ou d'esquiver...
Nous sommes privé de cet échappatoire, d'un besoin irrésistible, d'un moyen de lutte et de défense et cette addiction devient réellement problématique à partir du moment où ce besoin, cette obstination et cette habitude ne peut plus être enlevé de notre quotidien.
Si je viens à écrire tout ça, c'est également pour appuyer sur le fait que les jeunes ne sont pas réellement compris, souvent jugés et les stéréotypes concernant l'
alcool et les jeunes sont parfois à l'origine d'un réel manque d'écoute et d'attention.
Il y a en effet deux cas : celui qui va consommer dans des milieux festifs et l'autre qui consommera pour noyer un mal être ou une souffrance.
C'est justement le deuxième cas, qui n'est pas suffisamment pris au sérieux ou du moins, comme il se doit. Pourquoi boit il ? Si ce n'est par amusement, mais qu'il y a une raison concrète à cela, les risques sont qu'il sera attiré par la boisson, dès que l'élément en question se présentera.
Par exemple :
"je bois quand je suis en colère" ; il va penser que l'
alcool le calme. Oui, probablement, mais seulement dans un premier temps ; l'effet recherché sera la détente, mais à long terme, il est fort probable qu'il y aura un effet inverse. C'est exactement comme celui qui boit lorsqu'il est triste ; il va boire jusqu'à que l'euphorie soit ressentie, mais un jour ou l'autre, il va consommer et tout va remonter : l'
alcool joyeux se transformera en
alcool triste.
Si une personne que vous connaissez est susceptible d'être dans ce cas, pensez qu'il ne sert à rien de sortir des discours ou des propos absurdes, s'énerver, remuer le couteau dans la plaie et juger, pour la simple raison que vous n'êtes pas forcément capable de comprendre réellement les ressentis de cette personne.
Vouloir aider quelqu'un contre sa volonté va être impossible, la seule chose de bien que vous pouvez faire, c'est de prendre le temps de l'écouter ; l'alcoolisme peut être très mal vu, les personnes sujet à cela le savent et sachez que dans la majorité des cas, il y a un sentiment de honte, notamment lorsque la personne est en pleine prise de conscience. L'arrivé de ce sentiment peut être très violent et c'est souvent lorsque celui-ci éclot, que la vie du consommateur va perdre tout intérêts.
La prise de conscience est souvent longue, d'une part parce que nous ne voulons pas admettre, de l'autre parce que l'
alcool prend une place tellement importante dans notre vie, qu'il est inimaginable d'arrêter. C'est pour cela que la personne s'isole, se cache et ment. Le refus de reconnaître, la peur, la honte, la culpabilité ... c'est en effet très dur d'arriver à se reconstruire, surtout quand notre vie dépend de quelque chose qui fait que nous ne sommes pas nous même, quelque chose qui nous plonge dans un état second et ce, tous les jours, depuis des années. C'est difficile de recoller les morceaux, cela demande du temps et beaucoup d'énergie.
"Je vais arrêter/à partir de demain, promis j'arrête !" : Que ce soit drogue ou
alcool, toutes les personnes ayant une addiction ont déjà prononcés plusieurs fois ces phrases, en vain …
Cela est majoritairement source de conflits familiaux ; si il en arrive à dire cela, c'est qu'il y a une prise de conscience. Ce n'est pas un mensonge, l'entourage ne peut pas réellement comprendre. S'il est imbibé par l'
alcool, il va être très difficile d'arrêter seul et c'est également très compliqué de le persuader d'entrer dans des groupes de paroles et/ou des centres spécifiques aux sevrages alcooliques. C'est une décision qui doit être prise par le consommateur et cela demande une grande détermination ; c'est un peu comme faire entrer un animal sauvage en cage, il sait qu'il sera privé de ses délivrances et intérieurement, il y aura mille et une émotions bouleversantes qu'il risque de ne pas forcément savoir gérer. Ce qui mène souvent à des refus d'être aidé et une grande détresse.
"Les rechutes, nous en avons tous fait et il y en aura certainement d'autres dans les années à venir … " Là, nous revenons sur le fait qu'un alcoolique ne sera jamais "guéri". Encore une fois, si vous rencontrez ce genre de cas, il ne faut pas en vouloir à la personne.
L'arrêt peut être particulièrement choquant, surtout lorsque les effets de manques apparaissent. C'est d'ailleurs pour cela que les alcooliques sont envoyés dans des centres spécialisés.
"A la base, je devais être hospitalisée le temps du sevrage et j'aurais peut-être mieux fait d'accepter. Cela a été réellement traumatisant. J'ai eu le même traitement et les mêmes doses prescrites à un alcoolique qui fait une cure de désintoxication ... déjà en soi, c'est humiliant et difficilement voir impossible de l'admettre. La seule différence, c'est qu'il n'y avait personne, aucune écoute, aucun soutien et il fallait se cacher, étant donné que j'étais sujet au "delirium tremens" (hallucinations et délires rencontrés lors d'un sevrage) et tout ce qui s'en suivait. J'ai essayé d'en parler à un proche, sans succès, mais il est impossible d'en vouloir à une personne qui ne peut (ou ne veut) pas comprendre. Enfin, ... je sais pas en fait, je n'arrive pas forcément à trouver les mots justes et ce soir, j'écris sans trop réfléchir …" Cela dit, si vous rencontrez un cas similaire, sachez simplement que l'écoute, c'est important ; c'est une torture intérieur perpétuelle, lorsque les mots et les ressentis ne peuvent être exprimés. Il ne faut pas avoir pitié, ni dédramatiser les choses de façon exagérées, un peu de compréhension suffit. Il peut arriver que la personne craque, ce qui est normal, mais n'oubliez pas que vous avez en face de vous quelqu'un de fragile et que cela est particulièrement dur à vivre. Pour toucher du bout des doigts la route de la sobriété, il faut du courage !
Qu'importe votre âge, il ne faut pas hésiter à en parler, c'est important. Il y a pas mal d'adolescents en difficultés qui s'enferment dans une carapace et qui n'en sortent pas par peur d'être incompris et même si le cas n'est pas inquiétant ou dramatique, le fait d'en parler à une personne de confiance ne peut qu'être bénéfique. Cela peut également éviter de se réveiller le lendemain, avec ce sentiment de honte ...
Cela peut arriver plus vite qu'on ne le pense ; ce qu'il faut également retenir, c'est que les années défilent, nous nous en rendons pas forcément compte et lorsque nous ouvrons les yeux, il est parfois trop tard.
C'est un poison légal qui cause préjudice, mais dans cette chute, dans ce vide, il y a forcément une branche sur laquelle se rattraper ; il faut la garder, s'y rattacher et se battre pour éviter de s'écraser tout en bas. Si elle se tord ou si vous lâchez, c'est certain qu'il y en aura une autre, non loin …. une plus solide et c'est celle-ci qui arrivera à vous persuader : finalement, il ne faut pas tourner autour d'une seule et unique chose. L'euphorie n'est jamais réellement loin. Elle sera différente, certes, mais probablement plus belle, plus forte, plus intense et bien moins nuisible qu'un poison qui persuade, trompe et détruit.